Le vide autour de nous

par | Avr 20, 2018 | Être Heureux•se, Reconnecter avec ses désirs | 6 commentaires

Nous les femmes, on se balade avec un vide autour de nous. Ce vide contient nos silences, quand on ne veut pas être la reloue qui signale que « non Jean-Pierre, ta blague sexiste nous fait pas rire ». C’est un vide bâti sur tes sourires forcés, ma tête baissée et le manque de respect qu’on accepte parce que le conflit, c’est pas notre truc. Ce vide est rempli de phrases comme « Oh mais ça va, c’est du second degré » « Sois pas si sensible ».
 
Ce vide se nourrit de l’argent qu’on ne demande pas, parce qu’on n’est jamais bien sûres de le mériter, parce qu’on ne saurait même pas comment le demander, parce qu’on a un toit au dessus de sa tête et qu’on peut même s’acheter du pesto bio sans regarder l’étiquette, et c’est déjà bien.
Ce vide est rempli de toutes les petites agressions qui nous rappellent à notre place, qui nous rapetissent, nous amoindrissent.
 
A tel point que tu ne sais plus te faire confiance : « c’est peut-être moi qui déconne. Pourquoi est-ce que je me sens aussi mal à l’aise, je suis peut être trop sensible. »
 
Ce vide est rempli de tous les cris qu’on ne pousse pas, parce qu’on est trop fatiguées pour se battre, parfois. Parce qu’on se demande si ça sert à quelque chose. Parce que c’est plus simple, aussi, de baisser la tête et changer de trottoir plutôt que de rééduquer tous les connards qui croisent ta route.
 
Il nous tire toute notre énergie. Il nous protège des autres, mais il nous coupe encore un peu plus de nous.
 
Ce vide c’est celui de nos corps qui n’ont jamais le droit de juste « être ». Des corps exhibés, triturés, qui ont toujours quelque chose de « trop » ou de « pas assez ». Des corps dans lesquels on n’apprend jamais à vraiment habiter. Qui peuvent devenir des poids, des prisons, des objets de haine au lieu de la magnifique et parfaite expression de qui nous sommes.
 
Ce vide c’est aussi ta culpabilité, tes zones d’ombres bien cachées, que tu ne veux pas aller regarder tellement elles seraient inacceptables. Ce sont les colères que tu n’as pas exprimées, les rancoeurs enterrées sous les compromis. La tristesse qui ne sort jamais. Les choix qui n’en sont pas. Mauvaise mère. Marie couche toi là. Pute. Frustrée. Hystérique. Naïve. Emotive. Faible. Autoritaire. Baisable. Pas baisable.
 
Ce vide étouffe ta voix. C’est lui qui fait que quand tu parles, c’est toujours plus petit, plus policé, plus gentil que ça ne voudrait. Ta voix s’entoure de « pardon » et de « enfin, peut-être, je sais pas » « J’ai juste une idée ».
Même nos mots se déguisent pour être entendus.
 
Ce vide a l’air anodin, tellement toutes les femmes le porte. Ce vide c’est notre façon de nous adapter à un monde qui ne nous écoute pas, qui nous explique ce qu’on doit vivre, à quoi ressembler et ce qu’il est ok de ressentir ou d’exprimer.
 
Un monde dans lequel ma copine indienne me dit « Tu sais, je ne devrais même pas être née. J’étais la deuxième fille de la famille ».
Un monde dans lequel je suis encore obligée d’entendre des choses comme « Ok, il y a des femmes battues, mais il faut voir à quel point parfois elles poussent les mecs à bout », l’air de rien, entre deux pintes.
 
Ce vide c’est notre protection et c’est notre pouvoir. Imagine si tu t’autorises à tout accepter de toi. A prendre la parole sans attendre qu’on te la donne et à témoigner sans essayer de te justifier. Imagine le pouvoir que tu aurais si tu n’avais pas peur de ne plus être aimée.

Imagine si ta vie commençait par toi. Ton plaisir. Tes envies. Tes désirs.
Si on rendait au reste du monde la responsabilité de se construire avec nous, en entier. Pas une version amoindrie ou domestiquée.
 
Je ne sais pas si le monde est prêt.
Je m’en fous.
 
Je veux tout de nous.

Partage cet article à une Aventurière :

6 Commentaires

  1. Bonjour, c’est très beau, très bien écrit et très très vrai….

    Je sors de mon vide peu à peu, après des années de conditionnement non perçu… Je remplace parfois le vide par de la diplomatie. J’avoue, je hais les conflits. J’aime la vie, mes filles, mes chats, la nature…..
    Si vous connaissez le livre de Anny Duperey qui s’intitule « les chats de hasard », il y a quelques paragraphes sur les gens qui aiment les chats…. C’est très beau et oui, j’aime les chats…
    Nous vivons dans un monde qui prétend que les femmes peuvent arriver à tout…tout en les enferment dans des petites cases – pas de kilos en trop, pas trop bavarde, sexy mais pas pouffiasse, ayant un cerveau mais pas trop d’idées……
    Bref, je vais m’arrêter ici…sinon ce sera un très long commentaire (je suis bavarde 🙂 )

    Bonne journée !!!!

    Réponse
  2. Merci Laure, ce texte me touche.

    Réponse
  3. Je suis très très touchée par ce texte tellement vrai… Merci Laure d’avoir mis en lumière ce que je pense et que je n’arrivais à exprimer ! Le statut « gentille nana » ne me convient plus. J’étouffe dans ce rôle. Bravo pour ce texte qui touche en plein cœur

    Réponse
    • Goodbye « gentille nana » bonjour la vraie Séverine 🙂

      Réponse
  4. Merci pour ce très bel article …

    Réponse
  5. Je suis touchée.

    Réponse

Soumettre un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée.

Reçois ton guide "Libérez votre génie de l'Open Space"

En t'inscrivant, tu recevras également les Love Notes des Aventurières. 

You have Successfully Subscribed!

Reçois la série "Trouver la bonne idée"

En t'inscrivant, tu recevras également les Love Notes des Aventurières. 

You have Successfully Subscribed!

Effets secondaires notoires : tu vas parler de ce que tu fais avec une confiance inébranlable et attirer des clients parfaits.

En t'inscrivant, tu recevras également les Love Notes des Aventurières. 

You have Successfully Subscribed!

Recevoir les étapes clés du Plan de Conquête de l'Univers

You have Successfully Subscribed!

Recevoir les étapes clés du Plan de Conquête de l'Univers

You have Successfully Subscribed!