Tout savoir sur le crowdfunding et les obligations légales

27/05/2025

Crowdfunding : définition et fonctionnement

Le crowdfunding se base sur l’idée simple que plusieurs personnes contribuent financièrement au lancement ou au développement d’un projet, généralement via une plateforme en ligne. Cette plateforme met en relation les porteurs de projet et les contributeurs potentiels, lesquels peuvent s’engager à soutenir l’initiative à hauteur de la somme de leur choix. L’esprit communautaire est souvent très fort : non seulement vous financez votre projet, mais vous fédérez également une communauté de supporters qui peuvent devenir vos premiers clients, ambassadeurs ou prescripteurs.

En pratique, le fonctionnement varie selon le type de financement : le don, le prêt, l’equity (investissement en capital) ou encore la prévente avec contrepartie. Pour savoir lequel s’adapte le mieux à votre projet, vous devrez réfléchir à plusieurs facteurs : la nature de votre activité, votre besoin en capitaux, la structure juridique de votre entreprise et vos objectifs à long terme. Quel que soit le modèle choisi, l’approche est la même : vous préparez une campagne de communication autour de votre initiative, vous fixez un objectif financier à atteindre et vous proposez des avantages ou des retours à vos contributeurs, selon la formule retenue.

Les principaux types de crowdfunding

Si vous envisagez de recourir au crowdfunding, vous constaterez qu’il existe plusieurs catégories, chacune répondant à des besoins différents. Voyons ces grands types de financement participatif pour mieux cerner leurs avantages et inconvénients. Le choix de la forme de crowdfunding aura d’importantes répercussions sur la législation applicable, mais aussi sur la relation que vous établirez avec vos contributeurs.

Le crowdfunding par don

Cette forme est la plus simple : les contributeurs versent des fonds sans attendre de retours financiers. On la retrouve beaucoup dans les projets à forte dimension solidaire ou culturelle. Par exemple, des associations ou des artistes solliciteront la générosité du public pour mener à bien leurs travaux. Si vous vous engagez dans ce modèle, il faudra toutefois respecter les règles de la collecte de dons, notamment vérifier si votre structure est éligible à l’émission de reçus fiscaux ou si vous devez respecter certaines obligations déclaratives.

Le crowdfunding avec contrepartie

Dans ce cas, les donateurs reçoivent une récompense non financière en échange de leur participation. Souvent, il peut s’agir de prototypes, de produits en avant-première ou d’expériences exclusives (visites, événements privés, etc.). Cette formule est très populaire chez les créateurs et les artisans, car elle permet de tester la demande du marché. Les porteurs de projet doivent toutefois être vigilants sur la gestion des contreparties promises : délais de livraison, qualité des produits, coûts logistiques… Tous ces aspects peuvent avoir des implications légales, surtout si vous vendez à l’étranger et devez respecter des règles douanières ou de TVA spécifiques.

Le crowdfunding en capital (equity crowdfunding)

Ici, les contributeurs deviennent investisseurs voire actionnaires, et peuvent toucher des dividendes si votre entreprise parvient à être rentable dans la durée. Cette forme concerne plutôt les projets avec un fort potentiel de croissance ou une ambition de lever des fonds importants. Sur le plan légal, c’est un domaine très encadré, car vous proposez au public de prendre part au capital de votre structure. Les exigences de l’Autorité des marchés financiers (AMF) en France sont nombreuses : vous devrez faire appel à une plateforme disposant du statut de Conseiller en Investissements Participatifs (CIP) ou d’une autre forme d’agrément pour respecter la réglementation.

Le crowdfunding par prêt (crowdlending)

Également appelé crowdlending, ce modèle permet aux contributeurs de prêter une somme d’argent pour une durée définie et avec un taux d’intérêt fixé, afin de soutenir le développement d’un projet. Au terme du prêt, les contributeurs récupèrent leur capital assorti d’intérêts versés par l’emprunteur. Sur le plan légal, il faut se référer à la législation sur le monopole bancaire et s’assurer que la plateforme de prêt dispose de l’agrément nécessaire. Les contrats de prêt et les modalités de remboursement doivent être clairement établis, sous peine de s’exposer à des sanctions ou des litiges ultérieurs. Dans le cadre français, une telle plateforme doit souvent être immatriculée en tant qu’Intermédiaire en Financement Participatif (IFP) pour agir légalement.

La réglementation française et européenne

Le crowdfunding est une activité réglementée dans de nombreux pays, et la France fait partie des précurseurs dans l’encadrement du financement participatif. Depuis 2014, plusieurs textes de loi et décrets ont été adoptés afin de protéger les investisseurs, clarifier le rôle des plateformes et s’assurer que ces opérations collectives ne servent pas à des fins frauduleuses. Parmi les grands principes, on retrouve :

  • L’obligation pour les plateformes de se doter d’un statut légal approprié (CIP, IFP, etc.) selon le type de financement proposé.
  • L’encadrement des montants pouvant être levés par les porteurs de projet, ainsi que des sommes investies par chaque contributeur, pour limiter les risques financiers.
  • La transparence quant aux risques, aux frais, et à l’utilisation des fonds recueillis, de sorte que les contributeurs investissent en toute connaissance de cause.

Au niveau européen, une réglementation harmonisée est désormais en vigueur pour unifier les règles du crowdfunding dans l’Union européenne. Le Règlement (UE) 2020/1503, connu sous le nom de “règlement European Crowdfunding Service Providers (ECSP) for Business”, a pour objectif de simplifier la création de plateformes de financement participatif à l’échelle européenne. Il vise à établir des normes communes, comme une limite de collecte fixée à 5 millions d’euros par 12 mois, et à faciliter la libre prestation de services de crowdfunding dans tous les pays membres. Les plateformes doivent donc se conformer à des exigences de transparence renforcées et à des obligations de gouvernance précises pour protéger au mieux les investisseurs.

Les obligations légales pour les porteurs de projet

En tant que créatrice d’entreprise, vous vous interrogez sûrement sur ce que la loi vous impose lorsque vous lancez une campagne de crowdfunding. De manière générale, vous devez veiller à fournir une information sincère et claire sur votre projet, son état d’avancement, vos perspectives de développement, et l’utilisation concrète des fonds que vous collectez. Les investisseurs dépendent de vos déclarations pour juger de la pertinence de leur contribution, et tout manquement à la transparence peut être sanctionné si l’on vous reproche de la publicité trompeuse.

Dans le cadre de l’equity crowdfunding ou du crowdlending, les obligations sont nettement plus formalisées. Selon la réglementation, vous devrez préparer un document d’information présentant les risques, les modalités d’investissement ou de prêt, et le contexte financier de votre entreprise. Par exemple, si vous sollicitez des investisseurs pour prendre une part de votre capital, vous devez respecter le cadre légal imposé par l’AMF afin de ne pas proposer publiquement des titres financiers hors de tout contrôle. Dans le cas d’une offre au public par émission de titres, il pourra vous être demandé un visa de l’AMF ou un enregistrement simplifié, selon les montants et la forme juridique de l’opération.

Les obligations légales pour les plateformes de crowdfunding

D’un autre côté, les plateformes auxquelles vous faites appel ont également des obligations strictes, car elles jouent un rôle d’intermédiaire essentiel. Selon le type de campagne que vous lancez, elles doivent être immatriculées en tant que Conseiller en Investissements Participatifs (CIP), Prestataire de Services d’Investissement (PSI) avec un agrément spécifique, ou encore Intermédiaire en Financement Participatif (IFP) pour le prêt. Ces statuts sont accordés par l’AMF ou l’ACPR (Autorité de Contrôle Prudentiel et de Résolution) et garantissent un certain niveau de protection aux investisseurs et aux porteurs de projet.

Les plateformes doivent mettre en place des procédures internes pour évaluer la fiabilité des projets, informer clairement les investisseurs sur les risques (risques de perte totale du capital, illiquidité, etc.) et s’assurer de la conformité des flux financiers (lutte contre le blanchiment d’argent, financement du terrorisme, etc.). Elles doivent en outre veiller à respecter un plafond de collecte pour chaque projet, qui, en France, a longtemps été fixé à 2,5 millions d’euros, puis relevé par les législations successives afin de s’aligner sur la norme européenne des 5 millions d’euros.

Comment choisir la plateforme adaptée ?

Pour éviter les mauvaises surprises, il est conseillé de ne pas choisir n’importe quelle plateforme, mais d’opter pour un prestataire reconnu, disposant des agréments nécessaires et d’une réputation solide. Les plateformes de crowdfunding réputées se distinguent souvent par :

• Leur historique de campagnes réussies, • La clarté de leurs conditions d’utilisation, • La lisibilité des frais facturés (aux porteurs de projet et/ou aux contributeurs), • Les outils de gestion qu’elles mettent à disposition (tableau de suivi, espace d’échange avec la communauté, etc.).

Prenez le temps de vérifier que la plateforme respecte bien la législation en vigueur et qu’elle dispose d’un statut officiel. Chaque plateforme doit afficher clairement son numéro d’immatriculation auprès de l’ORIAS (registre unique des intermédiaires en assurance, banque et finance) si elle agit en tant qu’intermédiaire. Dans le cas d’un site spécialisé en equity crowdfunding, recherchez le nom du CIP ou du PSI gérant la plateforme. Vous pouvez également consulter les avis d’autres entrepreneur·e·s qui y ont mené des campagnes, afin de connaître leur degré de satisfaction et d’identifier d’éventuelles difficultés rencontrées.

Étapes clés pour se lancer en toute conformité

Lorsque vous décidez de démarrer votre campagne de crowdfunding, vous allez passer par plusieurs phases, et chacune doit être accomplie avec minutie pour rassurer les investisseurs, respecter le cadre légal et maximiser vos chances de réussite. Voici les principaux jalons à franchir :

  1. Réfléchir au type de financement adéquat : don, contrepartie, prêt, capital. Vous devez être au clair sur vos objectifs et sur la structure juridique de votre entreprise.
  2. Choisir une plateforme reconnue : vérifiez les agréments, informez-vous sur les taux de réussite et la réputation des plateformes pressenties.
  3. Rédiger un dossier complet : préparez une présentation honnête, détaillée et transparente de votre projet, incluant votre business plan, vos projections financières et votre stratégie de communication.
  4. Soigner la communication : élaborez un plan de communication solide, en vue d’attirer rapidement des contributeurs et d’instaurer la confiance.
  5. Respecter les obligations formelles : assurez-vous que vous répondez aux exigences légales requises pour le type de financement choisi (informations précontractuelles, plafonds, contrats, etc.).

En parallèle, il est souvent recommandé de consulter un avocat ou un expert-comptable afin de vérifier la légalité de votre campagne, en particulier si vous réalisez une opération en capital. Un conseil avisé vous permettra d’éviter les pièges ou de régler rapidement les points de friction (contrat avec la plateforme, rédaction de statuts, etc.).

Erreurs courantes à éviter

Dans mon expérience, j’ai pu voir plusieurs porteurs de projet se retrouver en grande difficulté car ils n’avaient pas anticipé certains écueils. Par exemple, négliger la dimension contractuelle du crowdfunding peut coûter cher : si vous vous lancez sans mettre noir sur blanc les conditions de participation et de remboursement, vous risquez d’être confronté à des litiges de la part de contributeurs insatisfaits. Autre point crucial : la sous-estimation du rôle de la communication. Vous devrez impérativement mobiliser votre réseau, utiliser les réseaux sociaux, envoyer des newsletters et, si possible, faire parler de vous via des médias spécialisés pour atteindre votre objectif financier.

Ne manquez pas non plus de soigner le suivi de votre campagne après la fin de la levée de fonds. S’il s’agit d’un projet avec contrepartie, vos contributeurs attendent leurs récompenses. En cas de retard ou de problème de fabrication, tenez-les informés et proposez des solutions. Si vous avez levé des fonds en capital, vous devrez aussi respecter vos engagements envers vos actionnaires et leur fournir régulièrement des actualités sur la santé financière de l’entreprise. Cette transparence contribue à votre crédibilité et à votre réputation d’entrepreneur·e. Enfin, méfiez-vous des éventuelles arnaques ou des fausses promesses de tiers qui prétendent booster votre campagne moyennant finance, alors que leurs méthodes sont souvent douteuses.

Exemples concrets de réussite

Pour illustrer tout cela, je pense à l’exemple d’une jeune boutique en ligne de produits artisanaux, fondée par deux entrepreneures audacieuses. Grâce à une campagne axée sur le crowdfunding avec contrepartie, elles ont réussi à collecter 20 000 € pour lancer leur première gamme de cosmétiques faits main et écologiques. Leur recette : une transparence totale sur la composition des produits, l’origine des matières premières et l’affectation précise des fonds. Les donateurs savaient que 30 % de la somme servait à financer la certification bio, 40 % l’achat de matières premières, et 30 % la logistique. Cette clarté a rassuré et convaincu.

Autre histoire inspirante, une startup technologique qui souhaitait développer un outil de gestion de l’énergie pour les maisons intelligentes. Elle a opté pour le crowdfunding en capital sur une plateforme disposant du statut CIP, réussissant à lever 300 000 € auprès de petits investisseurs. Sans passer par des business angels ni des fonds d’investissement trop exigeants, cette startup a pu conserver la maîtrise de sa stratégie et partager ses futurs bénéfices avec des contributeurs déjà sensibilisés à la transition énergétique. L’entreprise a depuis obtenu d’autres financements complémentaires et entame son expansion à l’international. Ces exemples montrent bien le potentiel transformateur du crowdfunding, à condition de respecter les règles et de bâtir un lien fort avec sa communauté.

Les défis et évolutions à venir

Le crowdfunding continue d’évoluer sous l’impulsion de l’innovation technologique. Désormais, de nouveaux modes de financement émergent, grâce à la blockchain et aux crypto-actifs, par exemple. Toutefois, ces innovations s’accompagnent aussi de nouvelles questions légales, car la réglementation est parfois en retard sur la technologie. En France, l’État et les autorités de contrôle s’efforcent de rester à la page, notamment via l’Autorité des marchés financiers, qui publie régulièrement des mises à jour concernant l’encadrement des ICO (Initial Coin Offering), apparentées à du crowdfunding en crypto-actifs.

Par ailleurs, la concurrence accrue entre plateformes de crowdfunding les pousse à innover pour proposer de meilleures fonctionnalités, un accompagnement plus pointu et des garanties renforcées envers les investisseurs. On voit ainsi apparaître des plateformes spécialisées par secteur (culturel, immobilier, écologie, etc.), afin d’apporter une solide expertise à la fois aux porteurs de projet et aux contributeurs. Cette spécialisation thématique est particulièrement intéressante pour les entrepreneures qui évoluent sur un marché de niche : en choisissant une plateforme ciblée, on s’assure de toucher une communauté déjà sensible aux types de produits ou services proposés.

Les montants levés ne cessent de croître, et le grand public s’intéresse de plus en plus à des placements responsables, éthiques et durables. Si vous êtes porteuse d’un projet qui répond à ces critères, vous trouverez sans doute un écho favorable auprès des investisseurs citoyens souhaitant avoir un impact positif tout en soutenant l’entrepreneuriat local. En même temps, les obligations légales deviennent plus strictes, précisément pour éviter que de telles initiatives ne se détournent de leur vocation ou n’exposent les épargnants à des risques excessifs sans information complète.

Il est également probable que la réglementation européenne se renforce encore, avec la volonté d’uniformiser les pratiques de déclaration et d’information. L’objectif reste double : protéger les investisseurs en leur garantissant une information fiable et standardisée, et soutenir l’innovation en permettant aux plateformes de se développer à l’échelle de l’UE sans subir des contraintes légales contradictoires dans chaque État membre. Pour vous qui envisagez le crowdfunding comme levier de croissance, c’est plutôt une bonne nouvelle : l’accès aux marchés étrangers sera plus facile si vous répondez aux normes européennes.

Enfin, un autre défi majeur concerne la sensibilisation continue. Malgré les succès enregistrés, beaucoup de projets échouent ou sont retirés parce que leurs initiateurs n’ont pas suffisamment préparé leur campagne. Entre l’aspect administratif, la gestion du planning, les obligations légales et la stratégie marketing, un manque de rigueur peut vite faire capoter l’aventure. C’est pourquoi il est crucial de se former, de demander conseil et de s’entourer de personnes compétentes. Les entrepreneures qui réussissent ne sont pas forcément celles qui connaissent tout sur tout, mais celles qui savent s’organiser et s’appuyer sur un réseau fiable.

Pour conclure, le crowdfunding demeure un outil formidable pour fédérer une communauté, tester son marché et obtenir un financement rapide. Il exige néanmoins une forte implication, un sens de la transparence et le respect d’un cadre juridique qui se développe au fur et à mesure que le financement participatif gagne en popularité. J’espère que cet article vous a donné un aperçu complet des obligations légales à connaître et des bonnes pratiques à adopter. N’hésitez pas à vous renseigner davantage, par exemple en consultant le site officiel de l’AMF ou en parcourant des ressources spécialisées qui détaillent les aspects techniques et réglementaires. Si vous ressentez le besoin d’un accompagnement personnalisé, prenez contact avec un professionnel du droit ou un gestionnaire de plateforme. Vous pouvez également envisager de consulter un organisme spécialisé dans l’entrepreneuriat au féminin, susceptible de vous aiguiller grâce à son expérience de terrain et son expertise sectorielle.

En définitive, osez vous lancer dans l’aventure du crowdfunding en toute sérénité, mais ne négligez jamais la partie légale. Votre succès repose autant sur le dynamisme et la créativité de votre projet que sur votre capacité à vous conformer à la réglementation, tout en établissant un climat de confiance avec les contributeurs. Alors, prête à franchir le pas ? Je vous soutien à 100 % dans cette démarche et j’ai hâte de découvrir les innovations que vous allez proposer grâce à l’énergie collective de votre communauté. À très bientôt pour de nouvelles ressources pratiques !

En savoir plus à ce sujet :

Publications